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Création de l’esthétique de la saison 6 de What We Do in the Shadows

Le chef opérateur Bevan Crothers, le producteur Todd Aronauer et le coloriste principal de Light Iron, Ethan Schwartz, décrivent leur collaboration.

De quelle couleur est le fantôme du père décédé d’un vampire ? Bien que cela ressemble à une blague, il s'agissait de l’une des myriades de questions nécessitant une réponse sérieuse de la part de Bevan Crothers, le chef opérateur, et de Todd Aronauer, le producteur, pour la sixième et dernière saison de la série du documentaire parodique de FX, What We Do in the Shadows. Pour répondre à ces questions, ils ont travaillé en étroite collaboration avec le coloriste principal de Light Iron, Ethan Schwartz, qui fait partie de l’équipe de Shadows depuis la première saison de la série, sur laquelle il a travaillé en tant que coloriste suppléant aux côtés du coloriste superviseur de Light Iron, Ian Vertovec ; à partir de la saison 2, Schwartz est devenu le coloriste principal de la série. Ensemble, Crothers, Aronauer, Schwartz et Christopher Riggs, producteur associé de Light Iron, ont veillé à ce que la saison 6 conserve une cohérence visuelle globale avec les saisons précédentes, tout en garantissant que la dernière innove et s'achève dans un style à glacer le sang.

Originaire de Nouvelle-Zélande, Crothers a fait ses armes en tant que chef opérateur et caméraman dans des documentaires et des documentaires parodiques et a travaillé avec le scénariste-réalisateur Jermaine Clement sur la série humoristique Short Poppies. Après le succès international du long métrage de 2013 sur les vampires de Clement et Taika Waititi, What We Do in the Shadows, Clement a proposé à Crothers de tourner la série télévisée dérivée Wellington Paranormal. Crothers a ensuite participé à l’un des projets télévisés de Clement, Time Bandits, en tant que l’un des chefs opérateurs du plateau principal. Travailler sur cette série lui a donné l’opportunité de rejoindre la dernière saison de What We Do in the Shadows de FX en tant que chef opérateur de la série.

Post-producteur de Shadows depuis sa cinquième saison, Todd Aronauer a commencé sa carrière dans l’industrie du cinéma et de la télévision en tant qu’assistant de production à la fin des années 1990 pour la série télévisée Sabrina the Teenage Witch, diffusée sur ABC. Il s’est rapidement tourné vers la post-production, qui, selon lui, l’a obligé à mettre la main à la pâte dans tous les aspects de la production, que ce soit pour participer aux discussions créatives avec les scénaristes, les réalisateurs et les dirigeants de la chaîne au début d’une série, pour travailler avec les chefs opérateurs et d’autres membres clés de l’équipe pendant le tournage principal, et même s’occuper des affaires commerciales et des autorisations pour le montage. Au cours de sa carrière, il a supervisé la post-production de séries telles que Supernatural, Ginny & Georgia et English Teacher

Après la fin de What We Do in the Shadows et les adieux des cinéastes aux personnages emblématiques de la série, notamment Nandor (Kayvan Novak), Laszlo (Matt Berry), Nadja (Natasia Demetriou), Guillermo (Harvey Guillén) et Colin Robinson (Mark Proksch), nous avons rencontré Crothers, Aronauer, Schwartz et Riggs pour discuter de leur collaboration sur la conclusion épique de la série.

Frame grab from 'What We Do in the Shadows' Season 6
Light Iron : Bevan, vous avez déjà tourné un certain nombre de mockumentaires. Comment ces expériences se sont-elles traduites dans What We Do in the Shadows ?

Bevan Crothers : Je suis passionné par les mockumentaires. Ils ont tous leur propre ensemble de règles qui doivent être mises en place au début. Quand j’ai rejoint Shadows, j’ai eu besoin de comprendre quelles étaient ces règles. À quel point la caméra est-elle interactive et impliquée ? Dans quelle mesure réagit-elle avec ce que font les personnages ? Quelle est l'amplitude du zoom ? Combien y a-t-il de caméras ? Il faut que les caméras travaillent dur pour capturer tout ce qui se passe.Sur Shadows on avait tendance à utiliser deux ou trois caméras parce qu’il y a généralement un grand casting, jusqu’à six personnes, une grande couverture est donc nécessaire. La réalisatrice Yana Gorskaya et moi-même utilisions souvent deux caméras pour créer l’aspect documentaire de la série.

Comment décririez-vous la vision de la série ? 

Crothers : La série a deux facettes. Le monde des vampires est sombre, coloré et légèrement théâtral avec sa couleur et ses costumes, le tout éclairé par des bougies et un clair de lune, c’est magnifique, et le manoir est vieux et de style victorien. Le monde humain est ennuyeux, austère et assez banal.

L’une des choses les plus importantes pour moi visuellement est que Shadows a commencé avec une saison 1 principalement éclairée par des bougies, des lampes au tungstène et des IHM, avec un clair de lune traversant les fenêtres et la lumière étrange de la caméra brisant le visage de l’acteur. Elle avait des tons similaires à ceux du long métrage original. Mais ensuite, la révolution LED s’est emparé de toute la série. Pour moi, cette série est un élément phare pour voir le développement des LED à partir de la saison 2, quand il commence à y avoir plus de couleurs et que l’éclairage sur le mur commence à se mettre en place. Au début de la saison 3, la série était bien avancée dans son apparence et sa structure d’éclairage.

Ethan Schwartz : J’ai l’impression que l’évolution technique peut aussi être vue, d’une certaine manière, comme faisant partie de l’histoire. Au fur et à mesure que les vampires se sont sentis plus à l’aise avec l’équipe, l’équipe a pu ajouter plus de lumières, habiller davantage le décor, introduire de nouveaux personnages et augmenter la valeur de la production dans son ensemble, comme toute série à succès. Avec cette évolution, j’ai également modifié mon processus de travail des couleurs pour ajuster les lumières en gel colorées afin d’obtenir un clair de lune lavande pâle parfait ou tirer parti des outils d'amélioration de Baselight pour créer des fenêtres sur les yeux et les visages beaucoup plus rapidement. Chaque saison, j’ai trouvé de nouvelles et meilleures façons d’améliorer l’étalonnage tout en conservant l’aspect original du mockumentaire.

Cette évolution a-t-elle également entraîné des changements au fil des ans dans la LUT utilisée pendant les prises de vue principales ?

Schwartz : La LUT de tournage de la série a été conçue à l’origine à partir de la Venice 709 S-Log3/S-Gamut3 avec quelques ajustements créatifs pour aider à visualiser le rendu final. Cependant, lorsque le HDR est devenu une exigence dans la saison 3, j’ai reproduit l'esthétique dans Baselight. Au fil des saisons, j’affinais l'esthétique à chaque fois pour obtenir de meilleurs tons de peau pour les vampires ou je modifiais l’atténuation des hautes lumières pour rendre une flamme de bougie ou un clair de lune plus doux. Il y a à la fois une noirceur et une vivacité qui sont une signature de la série.

Frame grab from 'What We Do in the Shadows' Season 6

Todd, on dit souvent que la post-production commence en préproduction. Est-ce que vous êtes d'accord ?

Todd Aronauer : Tous les département qui valent leur pesant d’or savent que tout le travail préparé en amont facilite grandement le changement de cap lorsqu'il se présente. Même si tout à été planifié, une fois que les caméras commencent à tourner, les choses changent, et le même phénomène se produit en post-production. The common adage is ‘we’ll fix it in post,’ but that diminishes what other departments do throughout the process that continually elevates the show as it progresses. Bien sûr, la post-production est cruciale dans toute production, mais la qualité de la préparation d’une série peut vraiment faire le succès ou l'échec du produit final.

Pour la saison finale, parmi tous les nombreux détails habituels à régler, la logistique du tournage sur pellicule 16 mm - en couleur et en noir et blanc - avec nos caméras Venice standard de série a été plutôt difficile à coordonner. Il n’y a plus beaucoup de laboratoires de cinéma qui développent du 16 mm, et encore moins qui développent du noir et blanc. La production s’est déroulée à Toronto, et nous avons travaillé avec FotoKem à Los Angeles pour développer et retravailler nos séquences. L’expédition d’un négatif non développé à travers les frontières peut devenir un peu compliquée à mettre en place correctement. Il ne faut pas qu'il passe aux rayons X ou qu'il soit manipulé d’une manière qui pourrait détruire notre matériel.

De quelle manière avez-vous commencé le processus de travail avec Light Iron ?

Aronauer : Quand j’ai rejoint la série pour la saison 5, c’était la première fois que je travaillais avec Light Iron. Mes premières discussions avec Christopher Riggs et l’équipe de Light Iron ont porté sur tous les processus - les transformations pour la mise en ligne, les effets spéciaux et la couleur, en passant par les drop-in et les livraisons finales  - bien avant d’en arriver à ces étapes. Pour la la saison 6, dès que nous avons eu connaissance des intrigues de base, j’ai pu discuter avec Light Iron des aspects, des esthétiques et des formats spécifiques qui affecteraient le processus de tournage pour obtenir l'esthétique finale souhaitée.

C’était vraiment génial de collaborer avec Ethan. C’est une grande source de connaissances. C’est quelqu’un que je contacte souvent, ainsi que Christopher Riggs. Nous pouvons tous les trois nous poser des questions, et cette communication ouverte m’aide à retourner voir mon équipe pour dire : « Voici quelques nouveaux paramètres à prendre en compte. Nous aurons plus de marge de manœuvre si nous suivons cette structure. » C’est toujours très collaboratif avec Light Iron, et j’apprécie tout ce qu’ils ont fait pour la série.

Crothers : J’avais entendu parler d’Ethan avant de travailler sur cette série. Tout le monde m'en disait du bien. Je l’ai appelé pendant ma préparation. Il a été d'une grande aide pour moi, un chef opérateur qui débarque au milieu d'une série comme celle-ci ; il comprend l’aspect et l’ambiance de la série. Il connaît les choses mises en place par d'autres directeurs de la photographie qui ont fonctionné ou non, et je voulais savoir ce qu’il avait eu à gérer sur cette série. Lors du tournage d'une scène du début à la fin, s’il s’agit d’une longue scène, les niveaux de brume ont tendance à changer et à se déplacer. Une prise pouvait avoir beaucoup de brume alors qu’une autre n’en avait pas, ou un acteur n’atteignait pas l’endroit qu’il avait atteint dans la dernière prise, donc l’éclairage était légèrement différent. Ethan fait beaucoup de travail pour aider à la mise à niveau et à la création d'une bonne cohérence.

Frame grab from 'What We Do in the Shadows' Season 6
Quels étaient les autres principaux domaines d’intérêt des étalonnages finaux ?

Crothers : Le clair de lune était un plus gros aspects à travailler. C'est un lavande pâle sur une lumière 5600K, LED ou IHM. Il doit être désaturé dans une certaines mesure pour créer un aspect argenté, sinon il paraît lavande-violet. Pour moi, la frontière est mince entre ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. 

Sur le plateau, nous avions tendance à régler la balance des blancs à 4300K, puis à éclairer tout ce qui était plus froid ou plus chaud à partir de cette donnée. Parfois, les bougies prenaient une teinte trop chaude. Selon moi, il ne faut jamais avoir la sensation qu'il y a trop d'éclairage. C’est une série haute en couleurs qui a une dimension théâtrale dans le manoir, sans en faire trop. C’était une chose importante à garder lors des retouches finales.

Christopher Riggs : Bevan, Ethan et Yana ont travaillé dur pour trouver le juste milieu entre une esthétique naturelle, théâtrale et extravagante. La série est également généralement sombre, donc équilibrer cela sur le plateau et dans l’étalonnage tout en conservant le contraste et la définition dans les basses lumières - permettant à des éléments comme les cheveux de Nadja, les costumes et les accessoires de conserver leurs détails - fait partie de l’ambiance de la série.

Crothers : Ethan a un œil incroyable pour les subtilités des couleurs et le décalage des expositions. Très souvent, je trouvais le rendu superbe, puis Ethan ajoutait une touche de magie et améliorait encore les visuels.

Dans un mockumentaire, obtenir constamment de la lumière dans les yeux des acteurs est l’une des choses les plus difficiles à réaliser. Ethan a été d’une grande aide dans ce domaine avec sa capacité à mettre en valeur et à magnifier les yeux des vampires. Nadja a une longue frange foncée, ce qui assombrit facilement ses yeux. C’est génial de creuser dans les détails des ombres et de les ramener dans un bon endroit.

Schwartz : Le mockumentaire est un genre difficile à étalonner. Il y a un équilibre à trouver entre donner l’impression qu’il s’agit d’un vrai documentaire et d’un monde sombre et vampirique. Au fil des saisons, D.J. Stipsen [le premier chef opérateur de la série] et Bevan m’ont fourni des images incroyables avec lesquelles travailler et m’ont permis de repousser les limites du style à certains moments. Comme les caméras devaient suivre les personnages comme dans un documentaire, elles ne pouvaient pas éclairer de manière traditionnelle, j’ai donc dû faire apparaître les visages et les yeux des acteurs assez souvent. J’utilisais également des clarifications pour diriger les yeux des spectateurs vers l’action.

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Y a-t-il eu des épisodes spécifiques cette saison qui ont été de vrais défis au niveau de la coloration ?

Riggs : L’épisode six, « Laszlo's Father », a été l’un des épisodes les plus passionnants et les plus difficiles à travailler, car il proposait plus de 200 plans de fantômes par effets spéciaux, où Bevan avait enveloppé un acteur dans des lumières LED qui interagissent avec tous les éléments de la scène. Ethan et Bevan ont passé beaucoup de temps à régler l’apparence du fantôme et la façon dont la lumière bleue qui en émane interagit dans toutes les scènes.                                                    

Crothers : Le fantôme du père de Laszlo est joué par Steve Coogan, qui portait un gilet à LED qui l’éclairait lui et tout ce qui l’entourait. En gros, c’était une lumière en mouvement. Le plus grand défi se trouvait dans le gilet et toutes ces LED ont dû être retirées par l’équipe des effets spéciaux afin d'obtenir le résultat final. Nous avons commencé avec le gilet original composé de LED qui avait servi pour le personnage d'un fantôme dans l'une des saisons précédentes. La couleur du fantôme avait déjà été établie. Je voulais qu’il reste dans le même univers, avec le même ton bleu, pour garder la continuité de l’aspect et de la sensation des fantômes représentatifs de ce monde.

La première veste à LED était assez imposante et les LED ont beaucoup évolué. Elles sont désormais plus profilées et contrôlables et émettent une lumière de meilleure qualité. L’un des électriciens a commencé à créer un nouveau décor. Nous avons fabriqué quelques prototypes pour essayer et établir l'intensité et la couleur de l’éclairage. Nous avons conçu un tube de diffusion qui s’adapte aux LED afin d’adoucir et de diffuser la lumière bleue sur le visage de Steve. Nous avons également programmé plusieurs groupes de LED de couleur assortie, installés au-dessus du plateau, pour imiter et faire correspondre les mouvements du fantôme dans chaque scène. Cela nous a permis d’étendre davantage l’effet de la lumière du fantôme. Cela a créé un sentiment beaucoup plus interactif.

Schwartz : Le fantôme était un défi amusant à relever. La combinaison LED a fonctionné à merveille et m’a donné beaucoup de lumière pour ajuster les couleurs. Une fois que nous avons reçu les premiers effets visuels temporaires, nous avons pu voir à quel point notre fantôme serait transparent. J’ai alors pu réduire sélectivement la luminance de la couleur bleue, ce qui nous a permis de mieux voir à travers et a donné plus de dimension à son corps. J’ai utilisé l’un des outils les plus récents de Baselight, le X-Grade, pour réaliser des ajustements de couleur très fluides et précis.

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Après six saisons, le manoir des vampires constitue un personnage à part entière. Bevan, comment avez-vous abordé l’éclairage de l’intérieur du manoir ?

Crothers : Je tenais vraiment à conserver la cohérence du ton et de l’ambiance de l’éclairage des saisons précédentes : l’éclairage sur les murs, le lustre vert, les bougies, la chaleur du manoir par rapport à l’obscurité de l’extérieur. Il était important pour moi de conserver l’obscurité du côté de la caméra en coulisses, afin d'apporter un côté comédie horrifique. Le manoir a des couleurs très établies, et je voulais garder ces couleurs salies. Par exemple, un cyan éclaboussé contre le mur sombre était rendu un peu boueux et horrifique pour éviter qu’il ne devienne trop joli. J’ai essayé de maintenir l’éclairage et la couleur dans un monde sombre de vampires sans jamais laisser ces accents et ces teintes prendre le pas sur les personnages. J’ai toujours voulu garder l’impression d'un éclairage par des lustres ou des bougies.

Pour le dernier épisode, Yana a décidé qu’elle aimerait voir l’équipe du documentaire plier bagage. On s'est dit : « Et si toute cette couleur et ces LED qui sont entrées dans la série, c'était l’équipe du documentaire qui les avait mises en place ? » Nous avons conçu une histoire d’éclairage, et dans ce dernier épisode, vous voyez l’équipe du documentaire retirer activement toutes ces lumières. Dans une scène, Nadja et Guillermo viennent du couloir du manoir dans le hall, et deux éclairagistes descendent les escaliers en tenant des tubes LED verts, qui renforcent la lumière verte du lustre. Après cela, vous ne voyez plus jamais ce rétroéclairage vert. Le plan d’éclairage a été conçu de manière à ce que toutes ces couleurs soient enlevées pour créer un résultat final ressemblant à la première saison, au premier épisode.

Comment avez-vous géré les ombres dans Shadows ?

Crothers : Ethan et moi avons travaillé pour que toutes les ombres aient l’air belles et solides, avec le moins de bruit possible. On tournait avec le Sony Venice, qui a une base ISO 2500, j’ai tout filmé à 1600, donc j’ai légèrement suréclairé puis j’ai réduit l’image avec le coloriste sur le plateau. Ethan pouvait ensuite apporter des modifications. C’est un manoir sombre, les murs sont sombres, tout est sombre, donc cela a aidé à protéger ces zones foncées et à les garder belles et propres. Lorsque les ombres sont ramenées au niveau souhaité, tout devient agréablement sombre. Ethan pouvait saturer un détail sans que l'image ne se désagrège ou produise du bruit.

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Michael Storey shot five of the episodes in Season 6. Bevan, how did the two of you collaborate to ensure your episodes would all feel of a piece?

Crothers : Michael avait déjà participé aux saisons 4 et 5 et connaissait déjà la série. J’ai eu une bonne préparation. Dès mon arrivée à Toronto, j’ai contacté Michael, je me suis présenté et il m'a fait part de ses idées pour la série. J’étais le directeur de la photographie principal, mais les premiers épisodes que j’ai filmés étaient les épisodes trois et cinq. Il y avait des décors sur lesquels j’avais travaillé avec le chef décorateur, que j’avais éclairés et testés, puis que j’avais remis à Michael. Il a ensuite utilisé ces décors dans les épisodes un et deux. J’expliquais ce que j’avais fait, puis il y ajoutait ses touches personnelles. Quand on a tourné, nos épisodes étaient vraiment différents. Les intrigues de Michael et le réalisateur Kyle Newacheck étaient davantage orientées sur le laboratoire de Laszlo et les bureaux de Cannon Capital. Mes épisodes avec Yana comportaient très peu de scènes dans ces décors.

Quand j’ai été engagé pour de bon, j’ai revisionné toute la série. D’abord parce que je voulais être sûr de connaître toutes les intrigues, puis je l’ai revue uniquement pour analyser la lumière et la caméra. Une chose que j’ai remarquée en regardant la série, c’est qu’il y avait un peu d’interprétation individuelle sur le clair de lune ou le vert du lustre dans le foyer. Les fondamentaux étaient les mêmes avec des styles légèrement différents.

D.J. Stipsen a été le chef opérateur du film original, puis le directeur de la photographie principal pendant les quatre premières saisons de la série, et il a réalisé le neuvième épisode de cette saison, « Come Out and Play ». Comment s’est passée cette collaboration avec lui ?

Crothers : L’épisode neuf était l’un des plus gros épisodes, avec des centaines de vampires, beaucoup de lieux et de grandes pièces de blocage. Nous avons eu sept jours de tournage au lieu des six habituels. Il s'inspire de The Warriors, et c’est une grande séquence de poursuite avec plusieurs combats. Nos vampires de Staten Island sont pourchassés par tous les autres vampires. D.J. est un bon ami de Nouvelle-Zélande, et j’ai réalisé que c’était une situation assez unique : j’étais le directeur de la photographie du réalisateur qui était lui-même le directeur de la photographie original et qui en sait plus que quiconque sur l'esthétique de la série. C’était génial, nous avons trouvé notre rythme, et c’était très plaisant de travailler avec un autre Kiwi ainsi qu'une équipe canadienne aussi formidable.

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Todd a mentionné le tournage avec une pellicule 16 mm pour le dernier épisode. Comment cela a-t-il été incorporé ?

Crothers : La première scène que nous avons tournée était en noir et blanc. Il y a une scène où les vampires installent un écran de projection et ils regardent un vieux documentaire en 16 mm sur les vampires. Yana a eu l’idée d’une très bonne référence au documentaire des frères Maysles, Salesman. Dans notre série, les frères Maysles ont tourné notre documentaire sur les vampires, mais il n’a jamais été diffusé. Au départ, nous comptions ajouter beaucoup d'effets en post-production pour créer l'illusion d'un vieux film, mais nous nous sommes ensuite dit : « Pourquoi ne pas le faire pour de vrai et obtenir le grain et l’ambiance parfaits ? » Nous l’avons donc tourné avec un Kodak Double-X 7222 noir et blanc de 16 mm, avec zooms, cadrage en 1.33:1.

Je n’avais pas tourné sur pellicule depuis peut-être 20 ans, alors quand je me suis retrouvé à préparer une scène d’environ quatre pages avec tous nos acteurs principaux, les effets spéciaux, les effets visuels, trois caméras, et en exécutant chaque prise de haut en bas, je me suis dit : « Ça va être intense ». Pendant la préparation de cet épisode, nous avons fait appel à une deuxième équipe, ayant l’expérience du cinéma, pour des essais avec deux doublures, qui étaient habillées dans une garde-robe similaire à celle de Nadja et Laszlo. Il y avait des mannequins avec des costumes et différentes nuances de maquillage ont été appliquées sur leurs visages pour tester les tons en noir et blanc. Nous avons examiné les rouges, les bleus et les verts afin de déterminer le contraste sur le film en noir et blanc. Je trouve le résultat absolument génial !

Schwartz: J’ai vraiment apprécié de travailler à nouveau sur une pellicule noir et blanc de 16 mm. Cela m’a rappelé l’inversion en noir et blanc sur une Bolex pendant mes études de cinéma. Comme la pellicule a été choisie spécifiquement pour son aspect, une fois que nous étions dans l’étalonnage, je n’avais plus qu’à peaufiner les petits détails et à m’assurer qu’ils correspondaient aux références.

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La fin a également surprise - ou les fins, pour être plus précis. Todd et Bevan, pouvez-vous décrire ce qui a été réalisé ?

Aronauer : Je ne connais aucune autre série qui ait essayé cela auparavant - nous avons diffusé trois versions différentes du final le même soir sur FX, une version Usual Suspects à 10 h, une version Rosemary’s Baby à 10 h 30 puis une version Newhart à 11 h. Nous avons également livré uniquement les scènes d’hypnose qui pouvaient être considérées comme du contenu supplémentaire sur Hulu, ainsi qu’une cinquième livraison de la version Usual Suspects avec les scènes alternatives incluses à la fin après le générique. Nadja regardant la caméra et utilisant son hypnose de vampire sur le public a été vraiment utile pour garder le tout dans son contexte.

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Crothers : L’une des fins imite essentiellement la fin de Newhart, lorsque Bob Newhart se réveille et réalise que tout cela n’était qu’un rêve. Nous avons reproduit cette scène, qui avait été tournée à l’origine en 35 mm, avec les mêmes caméras 16 mm que nous avions à bord, en tournant en 16 mm couleur avec Kodak Vision3 500T 7219. Nous avons filmé et éclairé la scène image par image avec l'aide de Nandor et Guillermo. 

Pour l’une des autres fins, le département artistique a construit le décor du poste de police de la fin de The Usual Suspects. Le rôle de Kevin Spacey est joué par Colin Robinson, qui a fait un excellent travail. We shot it all drama-style, completely away from the mockumentary feel. À nouveau, cela s'est fait plan par plan, imitant les mêmes prises de vue et les mêmes moments cinématographiques.

Ensuite, la troisième fin style Rosemary’s Baby. Le département artistique a de nouveau accompli un travail incroyable en transformant le salon de musique du manoir des vampires en la chambre de Rosemary’s Baby avec le berceau, où le personnage de Mia Farrow entre et demande : « Qu’avez-vous fait à mon bébé ? » Dans Shadows, ce rôle est joué par Nadja, vêtue de la robe bleue, tenant le couteau. Nous avons tourné ce film, ainsi que la fin style Usual Suspects avec la Sony Venice accompagnée d'une variété d’objectifs plus anciens. Lorsque j’ai rejoint Ethan pour l’étalonnage, nous avons ajouté une trame de film, des textures de 35 mm, et c’était génial de créer une esthétique similaire à ces fins emblématiques.

Schwartz : J’ai passé pas mal de temps à revoir tous ces films et séries pour me faire une idée du rendu visuel. Une fois que j’ai été à l’aise avec la compatibilité, il s'agissait de savoir comment ces films se sentaient dans notre mémoire, et comment ils s’inscrivaient dans l'univers des vampires. J'ai pris beaucoup de plaisir à recréer les looks de certains de mes films préférés.

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Todd, le fait d'avoir des fins différentes pour différentes plateformes de distribution ajoute-t-il des difficultés au processus de post-production ?

Aronauer : Oui, cela ajoute des livraisons supplémentaires, des contrôles de qualité et des minutages différents, des mélanges, des corrections de couleurs et des sous-titres pour toutes les équipes de localisation en aval. Jonathan Frank et son équipe de FX se sont donné beaucoup de mal pour essayer de garder le secret.

C’est beaucoup, mais pour moi, ces casse-têtes sont la raison pour laquelle je fais ce que je fais. Des séries comme celle-ci qui font les choses différemment sont les plus intéressantes. Ce n’est pas le même épisode d'une semaine à l'autre.

Bevan, qu’est-ce que cela a signifié pour vous d’être le chef opérateur de la dernière saison de cette série ?

Crothers : J’en suis extrêmement fier. Il s'agissait d'une énorme opportunité pour moi, et je me suis dit : « Je vais frapper le plus fort possible. » Étant donné que le long métrage est originaire de Nouvelle-Zélande et qu’il est très emblématique là-bas, je me suis senti honoré, en tant que Néo-Zélandais, d’avoir terminé la série avec une équipe aussi incroyable. Et en ce qui concerne les fins, je pense que l’épisode 11 porte ses fruits et qu’il est très respectueux du public, de l’histoire et des personnages. Je suis époustouflé d’avoir tourné le dernier épisode, mais en même temps, j’aimerais que ce ne soit qu’une pause et que nous revenions pour plus !

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