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L'Histoire avec un grand H

Le chef opérateur Trevor Forrest se penche sur la série Genius : MLK/X, diffusée par National Geographic.

Pour sa quatrième saison, la série Genius, diffusée par National Geographic, propose un portrait croisé de deux leaders inspirants, Martin Luther King Jr. et Malcolm X, qui ont tracé des voies parallèles en tant que pionniers du mouvement des droits civiques aux États-Unis dans les années 1950 et 60. Genius : MLK/X dépeint leurs parcours, de leurs premières années à leur ascension vers le devant de la scène, chacun ayant façonné un héritage qui reste encore aujourd'hui essentiel.

Pour MLK/X, Trevor Forrest a occupé le poste de directeur de la photographie, avec le concours du chef opérateur Joe « Jody » Williams pour certains épisodes. Forrest a travaillé en étroite collaboration avec Panavision pour sélectionner un ensemble d'équipements composé de caméras Panavised Alexa 35 et d' optiques sphériques Primo, avec des adaptateurs flare anamorphiques modifiés utilisés pour certains moments clés. « Trevor a été l'un des premiers à adopter nos adaptateurs flare anamorphiques », explique Dan Sasaki, vice-président principal de Panavision chargé de l'ingénierie optique et de la stratégie en matière d'objectifs. « Il les a utilisés sur Little Fires Everywhere, et lors de la préparation de MLK/X, il recherchait un effet anamorphique encore plus prononcé. Nous avons fini par modifier l'AFA pour qu'il continue à produire le flare anamorphique tout en favorisant une atténuation visuellement attrayante sur les bords. »

Voici les réflexions de Forrest sur la production, selon les propres mots du directeur de la photographie.

Lorsque j'ai lu les scénarios du pilote et des premiers épisodes, j'ai été d'emblée frappé par l'ampleur de l'histoire, qui retrace la vie entière de ces deux figures emblématiques mondiales. Quand bien même il s'agissait d'un biopic, j'ai pris conscience que l'essence de la série s'apparentait à un thriller moderne. Le lien parallèle qu'entretenait ces deux hommes, décrit dans le livre The Sword and the Shield qui a inspiré la série, a été le point de convergence.

En passant en revue la période allant du milieu des années 1940 à la fin des années 1960, j'ai commencé par essayer de créer une approche propre à chaque décennie. Cela m'a amené à suivre les mouvements socio-économiques de l'époque. Il y a eu l'avant-guerre, l'après-guerre, puis les années 1960, qui ont eu leur propre départ, car il s'agit d'une période particulièrement périlleuse pour Martin Luther King et Malcolm X. Leurs débuts étaient alors derrière eux et de nombreuses personnes les considéraient comme des menaces au statu quo politique. 

La pellicule Kodachrome inversible couleur a suivi exactement la même trajectoire. Cela est devenu mon point de repère, m'appuyant sur cette voie pour créer cet univers. Les spécificités de l'inversion sont beaucoup plus proches d'un capteur numérique que de la densité d'une pellicule de film d'animation à trois ou quatre bandes. L'inversion offre un rendu fin et net ; en d'autres termes, extrêmement précis.

Gordon Parks et Ernst Haas sont deux photographes de l'époque qui ont suivi ce parcours et ont utilisé les films Kodachrome. Ils figuraient déjà sur le tableau d'inspiration affiché dans le bureau de la réalisatrice Channing Godfrey Peoples lorsque je l'ai rencontrée. Les membres de l'équipe s'occupant des archives du magazine Life et du National Geographic ont été des partenaires extraordinaires. Ils m'ont permis de plonger physiquement dans les archives d'images pour trouver l'inspiration. C'est ainsi que nous avons conçu les palettes de couleurs des décors et des costumes, qui ont été superbement créés par Todd Fjelsted, directeur artistique, Mercedes Cook, costumière, et leurs équipes.

La façon dont nous avons représenté les différentes périodes dans la série devait suivre l'aspect de la pellicule au fur et à mesure qu'elle se développait au cours de ces décennies. De 1940 à 1945, correspondant à la période que nous avons appelée l'avant-guerre, les pellicules Kodachrome offraient des tons vert vif naturels, une palette sourde de toutes les autres couleurs qui étaient encore peu développées, des reflets crème et des ombres marron et bleues plutôt que noires. Nous avons abordé cette époque en nous inspirant de la nature : une luminosité naturelle la journée, un éclairage à la bougie et à la lampe torche la nuit à la campagne, et très peu d'éclairage public dans les villes.

Pour les années d'après-guerre, de 1947 à 1959, la technologie des pellicules s'est considérablement améliorée et le film Kodachrome est devenu la signature du magazine Life et de la photographie de l'époque. Les couleurs sont nettes et lumineuses, les carnations et les détails des vêtements sont bien définis et les ombres sont désormais d'un bleu marine profond. La guerre était finie et nous avons cherché à retranscrire l'extravagance et le soulagement avec davantage de couleurs, de mouvements de caméra et d'allégresse exprimée à travers les costumes et la lumière à l'aide d'une photographie au flash en lumière frontale et d'un éclairage au tungstène chaud de la rue et des intérieurs. Nous avons laissé les ombres se dissiper afin d'apporter une ambiance clandestine dans l'univers de Malcolm X et de souligner le drame intime auquel Martin Luther King est confronté dans sa vie personnelle et paroissiale.

Au cours des années 1960, le film Kodachrome atteint sa meilleure netteté, mais les ombres diminuaient très rapidement. Nous y avons associé une lumière fluorescente afin de créer un monde d'ombre et d'incertitude complété par des hautes lumières froides très nettes et facilement surexposées. Les ombres restent ainsi froides, mettant en avant la mode, les voitures et le style général de l'époque. Les temps étaient alors sombres et dangereux, mais la décennie, et le cinéma de l'époque, étaient dotés d'un style lisse et net. Le film noir avait atteint un autre niveau.

Nous avons utilisé des caméras Alexa 35 avec des objectifs classiques Panavision Primo. Nous avons associé les Primos à des adaptateurs flare anamorphiques modifiés pour mettre en relief des scènes particulières tout au long du film : des moments qui reliaient Martin Luther King ou Malcolm X à leur passé, ou des expériences émotionnellement fortes, par exemple quand le stress et la peur devenaient très intenses. J'ai utilisé les Primo à de nombreuses reprises. Je connais donc parfaitement leurs atouts. Je savais qu'ils rendraient avec précision la vaste gamme de superbes carnations et qu'ils représenteraient les personnages de manière à ce que l'on ait l'impression de pouvoir les toucher. La pureté, et non la netteté. La combinaison parfaite.

Ce projet était unique en raison de son importance culturelle encore essentielle. L'occasion de transposer les mots de ces deux hommes dans le monde d'aujourd'hui nous a été offerte. J'ai été sensibilisé à l'histoire par ma famille de techniciens, comme par exemple le chef électricien Justin Dickson, qui a grandi dans le sud des États-Unis, majoritairement baptiste à l'époque, et qui a partagé ses expériences très personnelles, son amour et son émotion pour les scénarios, renforçant ma capacité à raconter l'histoire. Il s'est agi de l'un de ces tournages qui n'arrivent que rarement dans une carrière. Une expérience véritablement unique.

Photos publiées avec l'aimable autorisation de National Geographic et de Trevor Forrest.

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