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Ne vous préoccupez pas de la technique

Chayse Irvin, ASC, CSC, parle du processus pour donner un nouveau souffle au genre du biopic avec le long-métrage Blonde sur Netflix.

Le cheminement pour tourner des grands films est encore plus diversifié que les plateformes qui les distribuent. Dans le cas du film Blonde de Netflix, un équilibre artistique entre le réalisateur Andrew Dominik et le chef opérateur Chayse Irvin, ASC, CSC, a donné l'occasion aux téléspectateurs de redécouvrir l'histoire bien connue de Marilyn Monroe sous un tout angle. En développant un langage visuel destiné à accompagner l'ambition du projet de recontextualiser l'héritage historique de Marilyn Monroe, Irvin a travaillé dans un cadre que certains considéreraient comme plus adapté à un musicien de jazz qu'à chef opérateur.

Basé sur le roman éponyme de Joyce Carole Oates qui mélange réalité et fiction, Blonde se différencie des autres biopics en étant un terrain de jeu particulièrement flexible du point de vue de l'interprétation visuelle. La nature kaléidoscopique du film offre un décalage entre le monde de Marylin Monroe, le pouvoir destructeur du box-office des studios, et Norma Jeane, la petite fille trahie qui n'abandonne jamais son père.

En travaillant avec Panavision Woodland Hills pour trouver un ensemble comprenant un Panavised Sony Venice et des optiques PVintage, Irvin a mélangé les rapports d'aspect, les formats, les couleurs et les aberrations optiques pour insuffler au film un souffle faisant écho à ce que Oates a accompli dans son livre. Panavision s'est récemment entretenu avec le chef opérateur pour parler de son approche créative pour Blonde et du cheminement qui l'a conduit à ce stade de sa carrière.

Panavision : D'où vient votre attachement à la cinématographie ?

Chayse Irvin, ASC, CSC : Mon grand-père souhaitait s'épanouir dans la photographie. Cependant, la situation en Amérique à l'époque a mis un frein à ses aspirations et il a dû travailler comme chauffeur de bus à Detroit. Mon père est un mathématicien et était le meilleur étudiant en mathématiques du Michigan. Il a habité dans le nord de la Colombie-Britannique après avoir immigré au Canada. Il y a eu une vie fort intéressante en tant que maître de poste général d'une petite ville avec une importante population amérindienne. Il avait des chiens de traîneau et fabriquait des tables de billard pour le compte d'un bar local jusqu'à ce qu'il décide d'étudier la médecine à l’Université de Colombie-Britannique. Il est maintenant un professeur de lycée à la retraite de 30 ans qui passe ses journées dans son jardin. Ma mère est musicienne, et plus précisément chanteuse de jazz.

On dirait que vous avez été guidé par la tradition.

Irvin : J'ai eu la chance d'observer les activités créatives de ma mère et son obsession de répéter sans arrêt ses chansons dans la salle de musique. Elle faisait partie d'une communauté de musiciens de jazz avec lesquels elle passait du temps en studio ou à faire des concerts, et trouvait également le temps d'être peintre. Savoir que j'ai eu des deux côtés de ma famille des personnes très créatives, l'un photographe et l'autre musicienne, est important beaucoup pour moi.

Cela fait penser aux images percutantes que vous avez créées à cette même intersection, avec les clips musicaux que vous avez tournés pour des artistes comme Leon Bridges, FKA Twigs et Beyoncé, pour n'en citer que quelques-uns. Comment est-ce que la musique a eu une influence sur votre approche de l'art de la cinématographie ?

Irvin : Venant d'un musicien de jazz, la discipline est un peu biaisée. C'est une forme d'art qui utilise l'intuition et la spontanéité pour exprimer un caprice artistique, résultant souvent d'une action au moment de l'inspiration. La majorité des choses sont vraiment difficiles à réaliser dans ce domaine. Cela arrive tout le temps dans le sport, un joueur récupère le ballon et réagit de manière spontanée vis-à-vis des autres joueurs, pour contraindre des éléments du jeu à travers sa manière de jouer. Il y a moins de réflexion en jeu, car au moment de penser à quelque chose, il est déjà trop tard. Le but est d'atteindre un certain niveau de conditionnement grâce à l'entraînement, afin que quand vous soyez dans le jeu, vous puissiez réaliser ce vous voulez plutôt que ce que vous pouvez. D'un point de vue cinématographique, ce sont les aspects auxquels j'ai vraiment accroché et que j'espère exploiter encore davantage en évoluant.

Quel est ce conditionnement pour un chef opérateur ? Qu'est-ce qui vous permet de rester en forme ?

Irvin : J'ai beaucoup appris des autres. Pas nécessairement en les observant sur le plateau et en travaillant, mais plutôt en binge-watchant des films. À un certain moment, au début de la vingtaine, je regardais trois films par jour, et je notais la dynamique des émotions que je ressentais et enregistrais le passage du film en question. Puis je me renseignais sur la vision ou l'approche esthétique du chef opérateur ou du réalisateur, car ils ont tous une certaine philosophie.

La faculté qu'ont certains photographes, par exemple Henri Cartier-Bresson ou Alex Webb, d'utiliser la composition avec des formes géométriques, des silhouettes et des espaces positifs et négatifs tout en effectuant ce que l'on appelle « la capture du moment décisif » est quelque chose que j'ai toujours admiré. Ils peuvent sentir que quelque chose est sur le point d'arriver, et ils appuient sur le déclencheur au moment précis où la situation se concrétise. Cela se fait sans aucun type de pensée et toujours de manière intuitive.

C'est différent de la production cinématographique traditionnelle, car beaucoup de films sont basés sur des idées préconçues, comme pour l'architecture : vous trouvez une structure visuelle et vous la respectez à la lettre. J'ai repris cette idée et je l'ai inversée dans les projets sur lesquels j'ai travaillé, en la rendant moins rigoureuse et presque plus fantaisiste. Quand je suis inspiré, je dois agir en conséquence. Il y a une signification là-dedans, et je ne la connais peut-être pas, mais je peux la ressentir. Peut-être que le la connaitrait plus tard. Mais pour le moment, elle me parle, et c'est quelque chose que j'essaie de garder à l'esprit.

Comment faites-vous pour conserver ce concept lorsque vous travaillez avec différents directeurs et départements ?

Irvin : J'avais 12 ou 13 ans quand mes parents se sont convertis au taoïsme et appris la philosophie orientale du Wu Wei. Celle-ci se traduit principalement par l'inaction ou la non-action, mais dans le sens de l'état de flow. J'ai travaillé avec certains réalisateurs qui m'ont aidé à atteindre un état de flow, qui est pour moi le paroxysme de ma créativité, un état où le film se tourne presque seul et où je n'impose rien. Tout va se faire, du moment que vous l'absorbez et que vous le laissez se produire. C'est la métaphore de la falaise frappée par les vagues, vous vous dites : « Cette pierre était si puissante. L'eau ne peut rien contre elle ». Puis vous faites un bond dans le futur de 2 000 ans, et cette falaise est complètement érodée par l'eau.

En tant que chef opérateur, une grande partie de vos responsabilités est liée à la résolution de problèmes. Quelle est votre technique pour réussir à ce niveau ?

Irvin : Pour moi, il s'agit moins de technique et plus de philosophie, car cela devient alors quelque chose d'intuitif. Si vous avez la philosophie, celle-ci est ancrée à quelque chose qui détient déjà la réponse. La cinématographie est une image bidimensionnelle, et l'un des buts que nous recherchons est la création de l'illusion de profondeur. Si elle semble être là avec la 3D, nous savons qu'elle peut avoir un effet hypnotisant sur le spectateur. Nous développons donc des idées et des techniques pour créer de la profondeur, ce qui peut se faire de différentes manières. Elle peut faire partie de la structure visuelle, mais peut aussi appartenir à la structure émotionnelle. La meilleure cinématographie est celle où les deux créent une longueur d'onde harmonieuse. L'aspect émotionnel rayonne à l'extérieur de l'écran et pénètre le cœur et l'esprit du spectateur (voire son estomac s'il est rempli de tension et de peur). L'autre profondeur agit comme une illusion, créant une image qui met la personne dans un état hallucinatoire ou la captive de telle sorte qu'elle regarde quelque chose parce qu'elle a l'impression que cela vient vers elle ou qu'il y a un voile sur quelque chose.

Un voile ?

Irvin : Le « voile de l'érotisme » est quelque chose qui appartient à mon idéologie artistique. Il se base sur certains enseignements que j'ai lus des philosophies de Friedrich Nietzsche et de ce concept d'attitude naturelle.

Dans presque toutes les expériences de la vie, votre cerveau construit presque tout en se basant sur l'association ou la mémoire pour pouvoir se concentrer. Cette expérience se produit au cinéma. Si je compose une image qui coupe la tête de quelqu'un pour ne laisser apparaître que son torse, le spectateur ne hurle pas d'horreur, il voit la tête dans sa mémoire. Il utilise des associations tirées de ses propres expériences en tant qu'être humain pour rendre ce qu'il a besoin de voir. Il s'agit d'une forme de naturalisme que je garde à l'esprit : « Plus vous êtes capable de dissimuler, plus le spectateur devra projeter sur l'écran ses propres expériences d'être humain ».

C'est une technique que j'utilise beaucoup, en particulier lorsque je pense à l'espace positif et négatif. Une silhouette que je considèrerai comme un espace négatif, vous créez la forme d'un individu qui est une figure complètement noire, presque géométrique. L'espace positif consiste à rendre l'arrière-plan très sombre, ce que nous avons beaucoup fait dans Blonde, où la clarté spatiale a été complètement manipulée. Il y a des images où la caméra est vraiment proche d'elle, l'arrière-plan devient noir et vous ne voyez qu'elle. Les observateurs voient la beauté, pas nécessairement grâce à la technique, mais parce qu'ils se rattachent à quelque chose d'émotionnel. Les deux chantent la même chanson.

Avec des fondements philosophiques aussi forts, comment se déroule la préproduction pour vous ?

Irvin : Mon processus de répétition est quelque chose que j'utilise maintenant de manière plus structurée. Dans le passé, je n'avais pas développé ces compétences, ou peut-être que je ne comprenais pas parce que j'imitais encore les autres. Ma mère m'a un jour raconté une histoire dans laquelle elle utilisait le terme « répéter », et je me suis dit : « Mais qu'est-ce que ça veut dire » C'est quoi répéter ? » Elle m'a expliqué que cela consistait à s'isoler avec une espèce de dispositif harmonique, à pouvoir l'emporter dans sa poche et de pouvoir le sortir quand vous vous voulez pour sortir de la routine. Pour Blonde, j'ai passé six mois à répéter. J'organisais des événements où je filmais un de mes amis avec des vêtements d'époque, au look classique et intemporel, sur du 35 mm en noir et blanc, et j'essayais des objectifs. Je créais des événements qui favoriseraient les accidents heureux (un terme utilisé par Conrad Hall [ASC]) qui sont devenus cet outil de répétition que j'avais dans ma poche.

Dans Blonde, il y a une scène de ménage à trois où l'image se déforme et les corps s'étirent. J'ai découvert ce look après avoir acheté un morceau de polycarbonate qui était en fait un double miroir. J'ai fait une prise de vue où j'ai demandé à quelqu'un de se regarder en arrière en non la caméra. Quand je me suis déplacé pour voir à quoi cela ressemblait de la perspective du talent, j'ai réalisé que le miroir n'était pas assez solide pour supporter son angle droit. L'image était déformée et ressemblait à un miroir déformant. Quelques mois plus tard, j'ai demandé au département artistique d'acheter deux feuilles similaires à celles que j'avais expérimentées, et je les ai mises dans le camion de machinerie. Alors que nous étions sur le point de tourner la scène, j'ai demandé aux machinistes de les sortir du camion, et nous les avons installées. Ce n'était pas quelque chose dont j'avais discuté avec Andrew. C'était complètement : « Comment créer quelque chose de différent ici ? Et si je faisais ça ? » C'était quelque chose de spontané.

Cette spontanéité est perçue comme une qualité inattendue par le département caméra. Comme vous l'avez dit plus tôt, la réalisation est souvent une question d'idée préconçue. 

Irvin : Le cinéma traverse une période étrange. Faire des films est aujourd'hui tellement à la portée de tout le monde qu'il est rare qu'un film vraiment avant-gardiste puisse être réalisé. Mais j'essaie de développer ces compétences pour vraiment faire avancer ce nouveau langage. Pour moi, c'est comme Miles Davis. Il sortait du scat jazz et du bebop, et c'était comme si toutes ces notes n'étaient que des sons insensés. Quand il a sorti son propre concept, il a suscité l'intérêt du spectateur car il a surpassé toutes les attentes. Cela semblait frais. J'ai besoin de nouveauté, de ce moment frais, de cette chose nouvelle qui peut être stimulée. Cette chose émotionnelle, c'est ce que je recherche.

Je suis plutôt de ceux qui ne savent pas ce qu'ils veulent avant de le voir. Un jour, j'ai eu une réunion avec Dan Sasaki [vice-président principal de l'ingénierie optique et de la stratégie des objectifs chez Panavision], et au lieu de porter une blouse de laboratoire, il était couvert de graisse, des coudes jusqu'aux doigts. J'ai tout de suite su que c'était ce que je voulais, car il s'agissait plus de contact humain. J'aime le contact humain. Les avancées technologiques ont été conçues pour permettre la mécanisation de l'humanité, mais c'est l'humanité que nous essayons d'articuler et de définir dans la cinématographie.

D'ailleurs, une grande partie des effets optiques que j'ai fini par expérimenter sur Blonde étaient issus de différents éléments donnés par Dan. Il y a une scène où la Norma Jeane jeune se réveille et où sa mère est en train de l'emmener dans un incendie sur une colline. Les images d'elle se réveillant s'ouvrent et se déforment en partie parce que je prenais un élément, en le plaçant à un angle de 30 degrés [devant l'objectif], puis à 90 degrés et en revenant en arrière. Cela a permis de créer ces transitions dont je suis vraiment fier.

Il y a un moment dans le film où nous avons fait un gros plan sur Cass, joué par Xavier Samuel, dans une scène de ménage à trois. C'est un gros plan sur son visage et il parle à Marilyn. Lors d'une prise, je me souviens avoir vu Jimmy Ward, mon premier assistant opérateur, appuyer sur le bouton d'étalonnage du Preston, et passer d'une mise au point éloignée à une mise au point rapprochée. En regardant le moniteur pendant qu'il faisait cela, ça a stimulé cette impression de voir quelque chose de nouveau. À mesure qu'elle se dirigeait vers le mur et qu'elle était de nouveau absorbée, l'image devenait presque complètement noire parce qu'elle perdait de l'exposition en entrant dans la macro, mais cela arrivait de manière rythmée, de telle sorte qu'on avait l'impression que la lumière diminuait avec l'obscurité parfaite. Pendant la prise, alors que nous tournions, j'ai simplement passé la main autour de la caméra et appuyé sur ce bouton. Andrew essayait de diriger les acteurs, mais je l'ai quand même fait, et je l'ai entendu dire : « Oh mon Dieu, oh mon Dieu. Qu'est-ce que c'était ? » Il était tellement enthousiaste et content. J'ai vu un effet, j'ai appuyé sur ce bouton, et Andrew a trouvé un moment pour le réutiliser plus tard dans le film.

Sachant que votre processus de préparation consiste à être familiarisé avec l'inattendu, quel rôle le format et le choix de l'objectif jouent-ils dans tout ça ?

Irvin : À la base, je pensais tourner le film en 35 mm, mais pour appuyer les dialogues d'Ana de Armas, nous voulions pouvoir faire des prises prolongées et tourner pendant de longues périodes. Peut-être deux semaines avant le tournage, j'ai fait un test en aveugle. J'ai filmé avec l'Alexa LF puis la Sony Venice avec lesquelles je n'avais jamais travaillé avant, et j'avais des objectifs grand format et 35 mm. Après le test, j'ai eu l'impression que je n'avais pas besoin d'une profondeur de champ si réduite, que je n'avais pas besoin que l'arrière-plan soit amplifié ainsi. Les caractéristiques des objectifs Super 35 avaient capté mon ressenti exactement à ce moment-là. Je pense que Jimmy Ward a commencé la préparation deux semaines avant le tournage, et j'ai fait le choix d'utiliser des objectifs PVintage deux jours après le début de la préparation. Il préparait différents objectifs et a dû les échanger pour préparer un ensemble complètement différent. Je découvrais. Il est difficile de savoir ce que représente quelque chose avant d'y arriver.

Il y a une séquence de flashback au cours de laquelle j'ai pris un objectif anamorphique 40 mm de la série C et l'ai fait pivoter à 90 degrés pour décompresser l'image verticalement, ce qui a rendu ce look que j'aime. C'est l'image de sa mère en noir et blanc qui la pourchasse dans la maison, et la petite Norma Jeane en train de ramper sous le canapé. J'ai été inspiré par un photographe du nom de Bill Brandt qui faisait des portraits de personnes et prenait des photos en grand angle déformées, mais ce n'était pas du fisheye. C'était presque comme s'il s'agissait d'un champ de vision normal, mais toujours doté d'une distorsion.

Mon objectif préféré pour le film a été le 90 mm macro. Lorsque nous l'avons installé et que nous sommes passés en plein cadre, il est devenu le plus bel objectif de portrait que je n'ai jamais vu. Il créait cette profondeur et cette beauté dans le visage d'Ana que j'aimais tant. Je me rappelle d'avoir toujours été surpris et comme envoûté chaque fois que je le voyais.

Andrew Dominik a dans le passé notamment collaboré avec Greig Fraser [ASC, ACS] sur Cogan : Killing Them Softlyet Roger Deakins [ASC, BSC] sur L'Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford. Il s'agit d'une bande de cinéastes talentueux.

Irvin : L'une des choses que j'ai aimées et apprises de Roger Deakins, c'est sa structure visuelle et sa rigueur dans la création de ce langage. La séquence [dans L'assassinat de Jesse James] dans laquelle le train arrive au coin de la rue et où on entend la musique relève de la maîtrise esthétique. Je n'avais jamais vécu une telle expérience cinématographique de ma vie. J'ai fini par aller voir le film huit fois.

Pendant des années, j'ai essayé de m'adapter à ça et d'en tirer des leçons, mais à ce stade de ma vie, il est clair que mon instinct est presque totalement opposé. Je suis poussé vers une toute autre direction, pour exploiter cette excitation et passer à l'action. Même les mélanges de rapports d'aspect [dans Blonde] ont surgi quand je travaillais avec Kahlil Joseph et qu'il regardait ma bande démo. J'ai participé à des tournages au format vertical et à d'autres au format écran large, et ma bande coupait entre les deux. Je me rappelle que l'une des premières choses qu'il m'a dites a été : « J'ai adoré comment tu as fait ça. J'adore tes rapports d'aspect. » Un mois auparavant, un autre réalisateur était venu me voir tandis que nous travaillions sur un projet en Inde et m'avait dit que c'était ce qu'il n'aimait pas dans ma manière de filmer.

Il est surprenant de voir comment vous avez réussi à mener une carrière cinématographique qui n'est pas sans rappeler celle d'un musicien de studio très prisé. Si on prête attention aux notes d'accompagnement, on peut constater que vous êtes responsable d'une collection de récits visuels qui défie tout algorithme, aujourd'hui et à jamais.

Irvin : J'ai été guidé pour faire comme Miles, inverser les choses et aller dans un sens opposé en termes de rapports et de formats. Pour moi, la démarche est moins conceptuelle et plus fonctionnelle. Le meilleur cadeau de Panavision a été l'aide à la préparation et l'espace pour entreprendre cette aventure. Quand il teste une caméra, un chef opérateur va généralement avoir deux caméras ou changer d'objectif et regarder les différences, c'est plus analytique, tandis que mois, je cherche juste à simuler des événements qui peuvent provoquer des accidents heureux.

À un moment donné, c'est une question de survie quand vous vous trouvez dans un lieu que vous ne contrôlez pas et dans lequel vous essayez de capturer des choses. Vous utilisez une autre partie de votre cerveau. Même si le jazz est une autre forme d'art et la photographie aussi, je dois me plier à cette tradition.

Photographies de plateau prises par Matt Kennedy. Toutes les images sont reproduites avec l'autorisation de Netflix.